Face à la stratégie industrielle chinoise, les industries mécaniques françaises s'organisent
Le 8 juillet dernier, la FIM a organisé à la Maison de la mécanique une conférence Mecallians intitulée « Stratégie industrielle chinoise et impacts sur le secteur mécanicien ». L'événement a réuni une centaine de participants autour d'experts et d'industriels venus analyser les mutations du modèle économique chinois et ses conséquences directes sur les industries mécaniques françaises.
Comprendre la stratégie industrielle chinoise
La première partie de la conférence a permis d'éclairer la stratégie industrielle chinoise sous plusieurs angles.
Christian Gianella, Ministre conseiller et chef du Service Économique Régional de l'ambassade de France à Pékin, a présenté les grandes lignes de la politique industrielle chinoise, soulignant les enjeux pour les entreprises européennes.
Jacob Gunter, Lead Analyst au Mercator Institute for China Studies (Merics), a alerté sur les risques liés aux surcapacités chinoises pour le secteur des biens d'équipement.
Enfin, Célia Colin, économiste au pôle Conjoncture & prévisions de Rexecode, a proposé un éclairage macroéconomique sur la situation.
Les supports présentés lors de cette séquence sont disponibles pour les adhérents FIM.
Témoignages d'industriels en première ligne
La seconde partie de la matinée a donné la parole à deux industriels directement confrontés à la concurrence chinoise.
Chiara Danieli, Directrice Générale du Groupe Bouyer (Fédération Forge Fonderie), a rappelé que la fonderie subit une pression chinoise croissante depuis 2007, avec deux phases marquées : une première, jusqu'en 2017, où les clients se sont progressivement détournés des fournisseurs européens, et une seconde, post-COVID, marquée par une explosion des importations chinoises. Elle souligne qu'aujourd'hui, même les clients subissent la concurrence des équipements chinois, souvent proposés à des prix imbattables. Elle appelle à des mesures de défense plus ambitieuses et collectives, au-delà des seuls outils existants.
Jacques Dupenloup, Directeur de la division Robotics France chez Staübli (Evolis), fait le même constat. Il observe que, depuis 4 à 5 ans, les robots chinois prennent d'assaut le marché européen, soutenus par des subventions massives. En 2024, 52 % des 523 000 robots vendus dans le monde l'ont été sur le marché chinois. Il alerte sur l'urgence d'une réaction rapide, estimant qu'il en va de la survie de l'industrie.
Des outils de défense, mais encore peu utilisés
Pierre-Eliott Rozan, chef du bureau Politique Commerciale à la Direction Générale du Trésor, a détaillé les mécanismes juridiques à la disposition des entreprises : mesures antidumping, antisubventions, et mesures de sauvegarde.
Il rappelle que la Commission européenne est désormais plus réactive, ouvrant davantage de procédures sur la base de menaces de préjudice. Cependant, les entreprises doivent s'organiser et déposer des dossiers solides pour activer ces leviers. Un accompagnement par Il souligne également l'importance de renforcer ces outils : la France plaide pour une réflexion plus large au niveau européen et des propositions législatives à venir.
Un appel à une réponse industrielle coordonnée
La question reste posée : les instruments actuels sont-ils à la hauteur des enjeux ?
Benjamin Frugier, Directeur général de la FIM, a soulevé des limites importantes : lenteur de mise en œuvre, fragmentation des intérêts, contournement des règles…
Chiara Danieli, de son côté, regrette que les petites structures, comme dans la fonderie, n'aient pas les moyens de mobiliser ces instruments alors même que leurs clients en subissent déjà les effets.
L'ensemble des intervenants appelle à une réaction collective forte et coordonnée, afin de défendre plus efficacement l'industrie européenne dans un contexte de bouleversement commercial mondial, alimenté notamment par la politique douanière américaine et le risque de déversement des flux vers l'Europe.
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